— Tu traînes encore ici ?
Noé resta silencieux. De toute façon, Noé ne dirait pas un mot s’il n’en avait pas envie. C’était un gosse secret, sauvage comme les mangoustes qui hantaient les montagnes. Il vivait la moitié de sa vie dans un monde qui n’était pas le nôtre. Les enfants de la crique le surveillaient de loin, le laissaient à l’écart de leurs conversations, ne sachant pas vraiment ce qu’ils pensaient de lui. Noé était trop flou pour qu’on puisse le cerner. Trop lointain, trop ailleurs quand il vous écoutait. Trop vif et trop curieux pour qu’on le considère comme l’idiot du quartier. En vérité, personne ne savait le situer. Même ceux qui l’appréciaient et s’étaient attachés à ce gamin dont l’imagination n’avait pas de limite. Depuis longtemps, Yesmine y avait renoncé. Noé était Noé. La gamine se pencha en regardant la plaie qui traversait la joue du garçon entêté.
— On dirait un Pirate du Fleuve… lâcha-t-elle dans un sourire tendre et moqueur. Comment tu t’es fait ça ?
Elle obtint sa réponse en regardant la case et son toit effondré. Noé se leva lentement, s’engagea sur le sentier qui longeait la falaise. Yesmine le suivit d’un pas rapide et décidé.
— Je cherchais quelque chose, marmonna le garçon.
— Quoi ?
Noé pressa le pas. Quand il était comme ça, il pouvait disparaître d’une seconde à l’autre.
— Noé ! Tu cherchais quoi ?
— Rien, je cherchais des livres, fit-il un peu plus bas.
— Céleste avait des livres ?!